De magnifiques tapisseries cosmiques qui nous révèlent les confins de l'Univers
En avril dernier, la NASA a fêté les 30 ans du lancement du télescope spatial que tout le monde connaît aujourd’hui, Hubble. On a tous vu en poster ou à la télévision, dans des documentaires, des images que ce satellite de la taille d’un bus a capturé au cours de sa longue carrière. Dans l’espace, au-dessus de l’atmosphère à quelque 400 kilomètres d’altitude, cet œil de 2,4 mètres de diamètre nous a émerveillé par ses vues imprenables et inédites sur l’Univers. Jamais celui-ci n’avait été vu avec autant d’acuité et de détails. Grâce à Hubble, on a ainsi pu pénétrer littéralement à l’intérieur de nuages emplis d’étoiles en gestation ou encore découvrir des centaines de galaxies en collision dispersées dans toutes les directions du cosmos.
Au plus profond de l’Univers
Parmi mes préférés, il y a ces tapisseries étourdissantes et vertigineuses où figurent des milliers de galaxies, d’âges et de distances différentes. En regardant ces images, on a presque l’impression de voir des organismes pléthoriques de planctons flottant à la surface de l’océan par une nuit noire, ou encore un mur peint d’un noir profond d’où émerge une multitudes de taches minuscules, jaunies, blanchies, parfois rouges, parfois bleues… C’est en réalité, comme vous pouvez vous en douter, beaucoup plus grand que tout cela, bien plus étendu que l’océan, plus éclectique, et tellement plus impressionnant. Pour ne pas dire, fascinant.
Ce que Hubble nous montre, en levant un coin du voile cosmique est une région de la voûte céleste minuscule, de la taille d’un grain de sable retenu entre le pouce et l’index au bout de votre bras tendu. Un petit trou de serrure par lequel regardent les astronomes pour tenter de voir les confins de l’univers. Ce sont des fenêtres ouvertes sur les objets les plus lointains jamais observés. Et que voit-on ? Des galaxies. Des centaines et des centaines de galaxies, toutes peuplées de 1 000 millions, 10 000 millions, 300 000 millions d’étoiles et plus… Des milliers de milliards de soleils, des plus petits, des plus gros, piégés dans des galaxies gigantesques en plein combat, ou égarées dans le vide intergalactique. Des images que l’on peut contempler des heures, pareil à des tableaux.
Les galaxies dont on discerne la forme sont les plus proches : quelques centaines de millions d’années-lumière. Bien sûr, ce que l’on voit est leur passé, ce qu’elles étaient il y a des centaines de millions d’années. Les choses ont beaucoup changé pour elles depuis, à l’image de ce que eux, là-bas, voient de la Voie lactée. Ils voient son passé, il la voit absorber des galaxies naines dont on a perdu la trace, ou presque.
Puis, il y a les galaxies encore plus lointaines, dont on a de la peine à distinguer la forme, qui ressemblent à des pâtés rouges ou orangé et, encore plus loin, celles qui ne sont plus que des points lugubres, fantomatiques… Des galaxies à des milliards d’années-lumière et, pour les records, à 12 ou 13 milliards d’années-lumière ! À de telles distances, ce sont des bébés avides que l’on voit. Elles grandissent au sein d’Univers tout jeune. C’est un enfant qui n’a pas encore un milliard d’années. La Voie lactée n’était encore qu’un agrégat de petites galaxies, un noyau de matière qui va progressivement capturer des proies avec ses tentacules gravitationnelles. Aujourd’hui, les astronomes regardent et étudient ces proto-galaxies, à la lisière de ce qui est possible de voir, à l’orée des berceaux des toutes premières étoiles.
Des galaxies lointaines magnifiées par des lentilles gravitationnelles
Il est d’autres images fascinantes, appartenant elles aussi aux Hubble Deep Fields et Ultra Deep Fields : les lentilles gravitationnelles. Comme l’avait prédit Albert Einstein, les objets massifs déforment l’espace-temps au point de dévier les rayons lumineux venant d’une source plus lointaine située à l’arrière-plan. C’est ce que l’on peut voir sur cette image d’Hubble : un amas de galaxies très massif offre la possibilité aux astrophysiciens de voir ce qui se cache plus loin derrière. L’objet galactique désigné LRG-3-817 ou SDSS J090122.37+181432.3 est magnifié. Il est possible de le caractériser, d’inférer sa composition, en dépit des distances considérables. Sans cet effet, il aurait été impossible de le décrire. Les confins de l’Univers se retrouvent ainsi, parfois, grossis, à notre portée.