L’impact de la sonde spatiale DART avec un astéroïde et ce qui s’ensuivit en images
Dans la nuit du 26 au 27 septembre, à 1 h 15 heure de Paris, il s’est produit dans l’espace un événement qui marque une première à jamais pour l’humanité : une collision volontaire d’une sonde spatiale avec un astéroïde. Mais pourquoi la NASA a-t-elle lancé cette mission suicide sur un corps céleste à 11 millions de kilomètres de la Terre ? Pour voir ce que cela ferait de heurter un petit astéroïde et surtout, si cela peut suffire à le dévier de sa trajectoire au cas où il se précipiterait sur notre Planète. Car si tel était le cas, l’impact causerait des dommages considérables à l’échelle planétaire ou, c’est moins pire mais grave quand même, à une échelle régionale. Tout cela dépend aussi, bien sûr, de la taille de l’astéroïde ou de la comète qui nous frappe, de sa masse, sa structure interne et de sa vitesse. Cela est déjà arrivé des milliers et des milliers de fois dans l’histoire de notre Planète, beaucoup à ses débuts chaotiques (bombardements de météorites et d’astéroïdes, de comètes) et cela arrive encore aujourd’hui. Heureusement, beaucoup explosent dans l’atmosphère à leur arrivée, et sont ainsi réduits en miette, mais nous savons tous qu’un gros morceau de 10 kilomètres comme celui qui a frappé la Terre il y a 65 millions d’années serait ravageur pour la biosphère, mettant durablement en péril la vie sur Terre. C’est ce qui a, en partie, et c’est bien connu, entraîné la disparition des dinosaures (et pas qu’eux d’ailleurs) à cette période. Je précise « en partie », car d’autres causes ont été identifiées ces dernières années par les scientifiques : déclin général des espèces en cours avant la chute de la météorite, recrudescence du volcanisme, et un impact géant de comète ou d’astéroïde. De récentes recherches ont même mis en évidence un deuxième cratère lié à l’événement dit de Chixculub, du nom du site où se situe le cratère principal, dans le golfe du Mexique et le Yucatan. Il y en a sans doute encore d’autres à découvrir, car le corps venu de l’espace était probablement fragmenté avant l’impact.
Tout cela est fini maintenant depuis bien longtemps et la vie a reconquis la surface de la Terre en l’espace de plusieurs centaines de milliers d’années après le choc. Mais les astronomes estiment qu’un événement comme celui-là se produit en moyenne tous les 100 millions d’années. Nous ne sommes donc pas à l’abri que cela recommence. Personne ne sait encore prédire avec exactitude s’il y a des comètes qui sont actuellement sur une trajectoire de collision avec notre planète. Parce que nous ne les connaissons pas toutes, nous ne les voyons pas toutes. Idem avec les astéroïdes, même s’il est plus facile de repérer les plus gros spécimens. Les plus petits, quant à eux, sont plus nombreux et difficiles à débusquer. Ils sont nombreux encore à nous échapper.
La mission DART de défense planétaire contre les astéroïdes
C’est donc pourquoi la NASA a imaginé et réalisé un programme de défense planétaire, dont le premier volet consistait à percuter un astéroïde afin de voir sa réaction. Mais ce n’est pas tout, autant faire d’une pierre deux coups, si l’on peut dire, et étudier dans la foulée le nuage de poussière qui s’est dégagé de l’astéroïde blessé, mesurer sa vitesse de propagation, sa densité, son étendue, et bien sûr voir quels sont les dégâts en surface, et si la structure interne du petit astéroïde est très abimée. Le cratère va permettre aussi de voir les couches sous la surface. Les astéroïdes comme Dimorphos intéressent beaucoup les astronomes, car ils sont des témoins survivants de la formation du Sytème solaire.
Parallèlement aux observations menées depuis la Terre et l’espace pour ausculter Dimorphos, des chercheurs suivent de près ses mouvements et si la collision a modifié sa trajectoire. Précisons que même si c’est très faible, cela peut être suffisant, à des millions de kilomètres de la Terre, pour qu’il nous évite par la suite. Autre précision, l’astéroïde n’est pas sur une trajectoire de collision. La mission n’est qu’un test pour se préparer à l’éventualité d’un impact dans les décennies ou les siècles à venir. Un programme que n’avait pas, hélas pour eux, les dinosaures.
Qui est l’astéroïde qui a subi la collision avec DART ?
L’astéroïde avec lequel la sonde DART (Double Asteroid Redirection Test) est entré en collision s’appelle Dimorphos. Il est le plus petit membre (160 mètres de longueur) du tandem qu’il forme avec Didymos. C’est la lune, en quelque sorte, de Didymos. Tous les deux sont ce qu’il s’appelle un astéroïde binaire.
Sur Terre, plusieurs télescopes et radiotélescopes ont suivi l’événement et sur leurs images, on peut voir le sursaut de luminosité causé par l’impact ainsi que la nuée qui entourait l’astéroïde. Cela a dû faire un gros choc pour Dimorphos, mais l’amplitude n’est pas encore bien connue pour l’instant. À ce sujet, la mission Hera, de l’ESA, s’envolera bientôt (fin 2024) pour se rendre sur place et mesurer l’étendue des dégâts.
La fine fleur des télescopes spatiaux, Hubble et Webb, a aussi regardé depuis leurs positions respectives, le choc et ses répercussions.
L’impact de DART avec l’astéroïde vu par le télescope James-Webb
L’ESA explique dans le communiqué combien cela a été un véritable défi pour les équipes du télescope Webb de préparer les observations de la violente rencontre de DART avec Dimorphos. Car ce dernier, relativement proche (11 millions de kilomètres seulement) est en mouvement rapide à travers le Système solaire. C’est une cible qui bouge énormément en l’espace de quelques secondes et par conséquent, plus difficile à suivre qu’une galaxie lointaine, à des milliards d’années-lumière de nous. « En raison de la vitesse de déplacement de l'astéroïde dans le ciel, les équipes ont travaillé dans les semaines précédant l'impact pour activer et tester une méthode de suivi des astéroïdes se déplaçant plus de trois fois plus vite que la limite de vitesse initiale fixée pour Webb. »
Le JWST a regardé dans l’infrarouge avec son instrument NIRCam avant, pendant et après l’impact sur une période 5 heures. 10 images ont été réalisées. 10 images qui montrent les panaches qui s’étendent. Webb sondera à plusieurs reprises le petit astéroïde dans les mois à venir. Des observations avec le spectrographe NIRspec sont également prévues, afin d’inférer « la composition chimique de l'astéroïde ».
L’impact de DART avec l’astéroïde Dimorphos vu par Hubble
Également dans l’espace, mais plus près de nous (400 kilomètres au-dessus de la surface terrestre), Hubble n’a rien raté non plus de l’événement. Ses observations dans le visible avec sa caméra grand champ WFC3 nous montre les nuages de poussière qui s’envolent après que DART se soit écrasée. À plusieurs reprises durant des heures. 45 images ont été réalisées.
L’ESA indique que le pic d’éjecta le plus important à gauche correspond à l’endroit où DART a frappé Dimorphos. Les astronomes estiment pour l’instant que la luminosité de l’astéroïde binaire a été multipliée par 3 après l’impact, rapporte l’Agence spatiale européenne qui ajoute que les chercheurs « sont particulièrement intrigués par la façon dont cette luminosité est restée stable, même 8 heures après l'impact ». Nous en saurons beaucoup plus dans les jours et semaines à venir.
Comme son compère Webb, le vétéran Hubble (déjà plus de 32 ans de services) va continuer d’observer l’astéroïde blessé et suivre son évolution et s’il a perdu beaucoup de sang, enfin de matière, depuis le choc voulu par les terriens.
Est-ce que DART a réussi à dévier Dimorphos ? Nous le saurons bientôt.