Sirius, reine étincelante des nuits d'hiver
« L’Étincelante » tel devrait être le vrai nom de Sirius, l’étoile qui brille le plus dans le ciel terrestre depuis plus longtemps qu'Homo sapiens n'habite la Terre.
À écouter : Sounds of Sirius
Son nom latin d’aujourd’hui nous a été transmis par les Romains, lesquels l’avaient emprunté au grec Seirios qui signifie la « brûlante » ou « l’ardente ». Pourquoi ce qualificatif ? C’est en référence à son lever héliaque (son apparition avant le Soleil) laquelle annonçait, voici plus des deux millénaires, l’arrivée des jours les plus chauds de l’année. Une période que nous appelons aujourd'hui « canicule », du latin Canicula, qui ne signifie pas « fortes chaleurs » contrairement àce que l'on pourrait penser mais « petite chienne ». Quel est le rapport, diriez-vous ? Eh bien, c’est parce que Sirius brille dans le Grand Chien, Canis Majoris. Constellation dont l’apparition avant et après le coucher du Soleil, en été, augurait jadis du début et de la fin des journées les plus chaudes de l'année.
Sirius dans l'Égypte ancienne
Dans l’antiquité égyptienne, Sirius avait également un rôle d’annonciatrice. Son lever héliaque — à l’époque en juillet — était porteur d’une grande nouvelle pour les habitants : le Nil allait déborder, inondant de ses eaux boueuses et nourricières les champs qui s’étalent dans la vallée, colonne vertébrale de l’Égypte.
L’étoile sacrée incarnait la divinité Sôpdet ou Sépédet, qui dérive de l’égyptien « pointu », « précis », et que les Grecs nommèrent ensuite Sothis. Son culte était associé à celui de la puissante Isis, transfigurait dans le ciel à côté d’Osiris que l’on connait aujourd’hui sous les traits d’Orion, le Chasseur céleste.
L'apparition de Sirius dans le ciel juste avant le Soleil marquait le passage d’une année à l’autre pour les anciens Égyptiens. Il se murmurait à l’époque qu’au commencement, le ciel était des mêmes couleurs que lors du lever de Sépédet. Elle n’endossa le nom d’Isis-Sothis qu’à partir de la XVIIIe dynastie.
Dans la mythologie gréco-romaine dont nous avons hérité, la scintillante Sirius est posée sur la langue de Lælaps, un chien de chasse créé par Zeus pour protéger Europe qu’il a abandonné sur l’île de Crête après avoir abusé d'elle.
Le dieu le plus puissant de l’Olympe avait doté cet animal d’une grande force et de la faculté d’attraper toutes les proies qu’il poursuit. Il ne ratait jamais sa cible, à l’instar du javelot avec une pointe en or qu’avait également offert Zeus. Plus tard, leur fils Minos qui en hérita les offrira à sa fille Procris, grande chasseresse.
Sirius et son petit compagnon Sirius B
En la contemplant les nuits en hiver qu’elle transperce de son éclat bleu vif, Sirius-Sothis semble être une étoile solitaire tremblottant de froid… Or, ce n’est pas le cas. « La brûlante » a en effet un compagnon, Sirius B, qui fait bien pâle figure à ses côtés. Mais il ne faut pas se fier aux apparences, car ce petit point que l’on peut apercevoir dans une lunette ou un télescope quand son élongation est plus importante (on est dans une bonne période pour l'observer), avait dans le passé une masse bien supérieure à celle de Sirius A qui domine aujourd’hui le couple. Aussi, les deux astres ensembles, au plus haut de leur forme, devaient-ils donner l’illusion d’un deuxième soleil vus de la Terre. Mais l’étoile massive Sirius B, à bout de souffle, s’est effondrée sur elle-même il y a des millions d’années. Bien avant son compagnon qui, lui, a une vie plus tranquille (deux fois la masse du Soleil).
Ainsi ce petit point blanc que l’on pourrait trouver ridicule est-il une naine blanche, reste du cœur d'une étoile. C’est un corps très dense qui enferme l’équivalent de la masse du Soleil dans une sphère de la taille de la Terre.
Sirius B a été la première naine blanche découverte et étudiée. Les deux astres sont distants l’un de l’autre de 8 à 31 unités astronomiques, ce qui correspond entre 8 et 31 fois la distance Terre-Soleil. Si Sirius A était à la place de notre étoile, Sirius B naviguerait dans notre Système solaire au sein d'une zone comprise entre Saturne et Neptune. Leur distance avec la Terre est actuellement de 8,6 années-lumière seulement, soit le double de Proxima Centauri, l’étoile la plus proche de toutes.